Aller au contenu principal

Publicité événementielle et corporate governance

UBS sanctionnée par la bourse suisse

Selon un communiqué de presse du 14 janvier 2011, la commission des sanctions de la SIX Swiss Exchange a infligé une amende à UBS SA pour des violations de normes régissant la publicité événementielle et la corporate governance. Ces violations, intervenues entre 2007 et 2008, avaient donné lieu à une enquête, puis une procédure de la commission des sanctions. Elle s’est conclue par une décision de la commission. En substance, les manquements reprochés à la banque ont trait, tout d’abord, à l’annonce tardive de diminutions de bénéfices ainsi que de pertes, puis à l’imprécision des indications fournies quant aux rémunérations de ses dirigeants.
Concernant le premier grief, on relèvera que l’article 53 alinéa 1 du Règlement de cotation (RC) impose à l’émetteur d’informer le marché « des faits susceptibles d’avoir une influence sur les cours qui sont survenus dans sa sphère d’activité ». Conformément à l’alinéa 2 de cette disposition, cette communication au marché doit intervenir immédiatement (« dès qu’il a connaissance des principaux éléments de fait »). La Directive concernant la publicité événementielle (DPE) précise ce devoir d’information. En particulier, son article 3 définit ce qu’il faut entendre par des « faits susceptibles d’influencer les cours », au sens de l’article 53 RC.
La brève chronologie qui suit démontrera que l’exigence d’immédiateté dans l’annonce n’a pas été respectée par UBS : (1) dans des communiqués de presse du 13 février et du 3 mai 2007, les prévisions annoncées par la banque étaient positives, une croissance étant annoncée ; (2) en juillet 2007, les pertes du segment relatif à la banque d’investissement et ses répercussions potentielles sur le groupe étaient déjà connues. Les dirigeants d’UBS ont toutefois décidé de ne rien divulguer tout de suite, mais plutôt d’attendre les annonces des concurrents ; (3) le 14 août 2007, UBS a publié un rapport présentant les chiffres du 2ème trimestre de l’année en cours. C’est à ce moment seulement que la banque a procédé à un avertissement quant aux bénéfices du 3ème trimestre ; (4) à la fin du mois d’août 2007, au plus tard au début du mois de septembre 2007, UBS était consciente des pertes importantes qu’allait subir le groupe, mais les organes de la banque ont à nouveau décidé de différer l’annonce, préférant attendre que les chiffres précis et définitifs du trimestre soient disponibles, soit le 1er octobre 2007. On rappellera ici que les pertes pour l’année 2007 ont en définitive été colossales.
A deux reprises, UBS a ainsi décidé qu’il était plus opportun de temporiser avant de faire l’annonce au public. Or, il résulte des dispositions susmentionnées qu’UBS était tenue d’annoncer sans délai, dès qu’elles étaient prévisibles, les diminutions sensibles de ses bénéfices, ou encore les pertes. Il n’est pas nécessaire, ni autorisé d’attendre la publication de chiffres précis, et ainsi d’un résultat (bénéfice/perte) quantifiable. Des prévisions sérieuses à ce propos (mais non juste des spéculations) suffisent et le public (notamment les actionnaires) doit en être informé immédiatement. Tout retard est fautif, quelle qu’en soit la raison (par ex : éviter la réaction négative du marché ou encore attendre les annonces des concurrents). Les annonces effectuées par UBS le 14 août et le 1er octobre 2007 constituent donc bel et bien une violation fautive du RC et de la DPC. En effet, les baisses de bénéfices, puis les pertes importantes subies par UBS, qui étaient évidemment susceptibles d’influencer les cours, ont été annoncées trop tard.
La commission des sanctions de la SIX Swiss Exchange a également reproché à UBS de ne pas se conformer à la Directive concernant les Informations relatives à la Corporate Governance (DCG), notamment le chiffre 5.1 de son annexe, qui règlemente le contenu et la procédure de fixation des rémunérations et programmes de participation des dirigeants (membres du conseil d’administration et de la direction générale) de la société. Le rapport de gestion 2008 d’UBS manquait de précision et de clarté, et donc de transparence eu égard à ces questions de rémunérations. En effet, il se contentait d’indiquer que les rémunérations étaient fixées en fonction des niveaux pratiqués sur le marché pour des postes comparables. La commission des sanctions a estimé que cette indication était trop générale et ne satisfaisait pas les besoins d’information du public. Une information suffisante dans ce sens se doit d’expliquer de manière claire les critères utilisés pour fixer la rémunération.
Cette violation par UBS de la DCG a toutefois été qualifiée de légère et, en soi, elle n’aurait entraîné qu’un avertissement au contraire des manquements relatifs à la publicité événementielle. Selon la commission, ceux-ci constituent en effet une violation relativement grave du RC et de la DPE, qui justifie l’amende de CHF 100’000.- infligée à UBS.
Il n’en reste pas moins permis de douter de l’effet tout autant dissuasif que punitif pour UBS d’une amende d’un montant de CHF 100’000.-. Cependant la commission des sanctions de la SIX Swiss Exchange n’était pas habilitée à amender UBS de manière telle que la banque en « ressente » financièrement les conséquences. En effet, au moment des faits, la peine maximum prévue par le RC étant de CHF 200’000.- (art. 82 aRC). On notera que le RC, modifié notamment pour remédier à cette situation, admet désormais une amende maximale à hauteur de CHF 10 millions (art. 61 al. 1 ch. 2 RC). Quoiqu’il en soit, si l’amende infligée n’affecte pas UBS sur le plan financier, le véritable effet, que la société ne peut ignorer, est celui réputationnel, tous les médias s’étant fait l’écho du communiqué publié par la SIX Swiss Exchange.