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Droit des sociétés

L’état actuel de la révision du droit comptable

Le 8 décembre 2010, le Conseil national a achevé l’examen du projet de loi consacré au droit comptable, en y apportant quelques menues modifications (BO CN 20.09.2010 et BO CN 08.12.2010). Le projet a auparavant déjà été légèrement retouché par le Conseil des Etats dans sa session du 3 décembre 2009 (BO CE 03.12.2010) et sera prochainement renvoyé à cette chambre pour nouvel examen. Une chronologie plus détaillée du processus législatif se trouve ici).
Le but principal de la présente révision est d’instaurer des règles comptables uniformes pour toutes les sociétés inscrites au registre du commerce, indépendamment de leur forme juridique, en différenciant les exigences selon l’importance économique de l’entreprise. Le projet fixe ainsi de manière relativement détaillée le contenu minimal du bilan et du compte de résultat, en prévoyant également des règles d’évaluation. Les grandes entreprises seront soumises à une réglementation plus rigoureuse, ayant notamment l’obligation de fournir des informations supplémentaires sous forme d’une annexe aux comptes annuels, un tableau des flux de trésorerie et un rapport annuel. Enfin, la nouvelle législation régit également l’établissement des comptes consolidés et détermine les entreprises soumises à l’obligation de présenter des états financiers conformes à une norme comptable reconnue (p.ex. Swiss GAAP RPC ou IFRS). Selon le législateur, ces états financiers auront pour but principal d’améliorer la transparence des entreprises, mais ils restent, contrairement aux comptes annuels, sans effet fiscal. Le principe de l’autorité du bilan commercial pour l’imposition sera donc maintenu.
Globalement, le Conseil national a adhéré au projet approuvé par le Conseil des Etats. Les quelques modifications apportées par cette chambre visent les points suivants :
– Le seuil du chiffre d’affaires annuel des entreprises individuelles et des sociétés de personnes qui seront soumises à l’obligation de tenir une comptabilité a été porté de 250’000 CHF à 500’000 CHF (art. 957 al. 1 et 2 P-CO). Cette modification est intéressante, dans la mesure où les personnes morales peuvent être constituées avec un capital initial bien inférieur.
– La notion de petites ou moyennes entreprises a été redéfinie et comporte maintenant des entités dont le nombre annuel moyen d’employés à plein temps est inférieur à 250 (le projet du Conseil fédéral prévoyait un seuil de 200 personnes) (art. 959c al. 3 ch. 2 et art. 2 let. e ch. 3 LFus ; voir aussi l’art. 727 al. 1 ch. 2 P-CO).
– L’annexe doit indiquer les obligations pour lesquelles une perte d’avantages économiques apparaît improbable ou est d’une valeur qui ne peut pas être estimée avec suffisamment de fiabilité (art. 959c al. 2 ch. 10bis P-CO).
– En règle générale, les actifs doivent être évalués au prix d’acquisition ou au prix de production. L’art 960b P-CO crée une exception, en autorisant une évaluation de certains postes au cours du jour à la date du bilan. Dans un premier temps, cette disposition visait les actifs cotés en bourse. Le Conseil national a cependant élargi son champ d’application, en y incluant des « actifs ayant un prix courant observable » sur un marché actif – une notion relativement imprécise, qui pourrait encore provoquer des discussions.
– Les dettes doivent être comptabilisées à leur valeur nominale ou à leur valeur d’émission ou de reprise (art. 960e al. 1 P-CO).
– Le Conseil national a supprimé l’art 960f P-CO, qui régit le rapport avec le droit fiscal.
– Pour les comptes consolidés, des associés qui détiennent 20 % du capital social (auparavant 10 %) pourront exiger l’établissement d’un rapport de gestion (961d al. 2 ch. 1 P-CO).
– Les sociétés cotées en bourse, les sociétés coopératives (lorsqu’elles comptent au moins 2000 membres) et les fondations soumises au contrôle ordinaire auront, selon la nouvelle loi, l’obligation d’établir leurs états financiers selon une norme comptable reconnue et de tenir une comptabilité conforme au CO. L’obligation de dresser des états financiers selon une norme reconnue s’éteint lorsque l’entreprise présente des comptes consolidés correctement établis (art. 962 P-CO). Dans certains cas, les comptes consolidés devront cependant être conformes à ces normes (art. 963b P-CO).
– Les personnes morales, les associations, les fondations et les sociétés coopératives peuvent, à certaines conditions, transférer l’obligation d’établir des comptes consolidés à une entreprise qu’elles contrôlent (art. 963 al. 3 P-CO).
– Enfin, une société reste tenue d’établir des comptes consolidés si des associés détenant 20 % du capital social l’exigent (10 % du capital pour les coopératives ; 20 % du total des membres de l’association ou l’autorité de surveillance des fondations) ou si un associé qui répond personnellement des dettes de l’entreprise ou qui est soumis à une obligation de faire des versements supplémentaires le demande (art. 963a al. 2 P-CO).
En conclusion, la révision du droit comptable reste en chantier. Certaines dispositions nécessitent toujours un examen approfondi, raison pour laquelle le Conseil national a, notamment en ce qui concerne l’établissement des états financiers selon une norme comptable, délibérément adopté une version divergente, afin de permettre au Conseil des Etats de se repencher sur certaines questions. Vu l’état actuel de la révision du droit des sociétés dans son ensemble, le présent volet reste néanmoins le plus développé et on ne peut qu’espérer que le nouveau droit entre en vigueur dans un délai raisonnable et sans rencontrer d’obstacles majeurs.