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Staking

Clarifications sur la conservation et la distraction des cryptoactifs

Ces dernières années, les services de staking se sont multipliés et, avec eux, les questions juridiques les concernant. C’est afin de clarifier sa pratique, notamment s’agissant de la conservation des cryptoactifs, que la FINMA a publié la communication sur la surveillance 08/2023 en lien au staking.

La FINMA définit le staking comme le processus de blocage de cryptoactifs à l’adresse de staking d’un nœud de validation en vue de participer au processus de validation d’une blockchain fondée sur le mécanisme de la preuve d’enjeu. En contrepartie, les participants reçoivent des récompenses. La communication précise l’interprétation des lois (notamment art. 242a LP et art. 16 LB en lien avec art. 37d LB) concernant la distinction entre valeurs déposées protégées en cas de faillite et dépôts exposés au risque d’insolvabilité. Généralement, les cryptoactifs conservés peuvent être considérés par les banques comme des valeurs déposées devant être tenues hors bilan si ces cryptoactifs sont en tout temps tenus à la disposition du client. Dans le cas contraire, les banques doivent porter au bilan les cryptoactifs conservés, car ils représentent des dépôts du public.

À titre de rappel, la FINMA mentionne trois types de conservation des cryptoactifs, à savoir (i) la conservation individuelle, (ii) la conservation collective avec la part qui revient au client clairement déterminée, et (iii) la conservation collective sans que la part qui revient au client soit déterminée. Dans le cas d’une conservation individuelle, aucune autorisation selon le droit bancaire n’est requise. Cependant, le dépositaire doit respecter les exigences de la LBA. En présence d’une conservation collective avec la part qui revient au client clairement déterminée, une autorisation est nécessaire. L’autorisation Fintech (cf. art. 1b LB) suffit pour autant que les conditions soient remplies. Par contre, si le dépositaire conserve collectivement les cryptoactifs sans que la part qui revient au client soit déterminée, une autorisation bancaire classique est nécessaire.

Dans sa communication, la FINMA distingue essentiellement le non-custodial staking – par lequel les clients conservent le contrôle exclusif des clés de retrait de sorte qu’il n’y a pas de conservation ni d’acceptation d’actifs par des tiers – et le custodial staking qui regroupe la chaîne de staking et le direct staking.

Dans le cas où un établissement autorisé délègue l’opération de staking à un tiers (chaîne de staking), il possède une créance contre le prestataire tiers. Cette créance pourrait être soit portée au bilan comme une créance envers le prestataire tiers, soit traitée comme une créance en dépôt fiduciaire au sens de l’art. 16 ch. 2 LB et donc comme une valeur déposée, ce qui suppose l’application par analogie des directives SwissBanking sur les placements fiduciaires. Dans cette dernière hypothèse, le service de staking nécessiterait une convention fiduciaire avec un mandat de fiducie spécifique du client indiquant la sélection des cryptoactifs et les quantités à staker tout en informant des risques. De plus, la FINMA demande aux établissements (i) qu’ils limitent les risques de contrepartie en choisissant des établissements soumis à une surveillance prudentielle, (ii) qu’ils garantissent notamment que le prestataire tiers n’exerce pas sans droit, et (iii) qu’ils établissent un digital assets resolution package pour une gestion des risques. En présence d’un prestataire tiers étranger, la FINMA requiert aussi qu’il soit soumis à une surveillance prudentielle dans une juridiction à la réglementation équivalente offrant la même sécurité juridique que la Suisse concernant le traitement des cryptoactifs déposés. Avec les dernières évolutions à l’international, à l’image de l’action de la U.S Securities and Exchange Commission contre Coinbase, la question du respect des garanties exposées peut se poser en présence d’une chaîne de staking avec des prestataires étrangers.

Lorsque l’établissement autorisé pratique lui-même le staking (direct staking), il dispose directement des clés de retrait permettant de retirer les cryptoactifs bloqués. Dans ce cas, une distraction par le biais de l’art. 16 ch. 2 LB n’est pas envisageable. Néanmoins, en l’absence de précision législative ou jurisprudentielle sur la question de savoir si les conditions des art. 242a al. 2 LP et 16 ch. 1bis LB sont respectées, la FINMA a adopté provisoirement la pratique suivante : en cas de faillite, les cryptoactifs stakés doivent être distraits de la masse au profit des clients déposants conformément à l’art. 37d LB en relation à l’art. 16 ch. 1bis LB. De plus, elle renonce temporairement à exiger le respect des exigences en matière de fonds propres concernant les cryptoactifs stakés sous réserve du respect de certaines exigences cumulatives, comme l’existence d’une instruction spécifique du client sur le type et la quantité de cryptoactifs. Pour les acteurs non assujettis, la FINMA estime qu’il n’y a pas d’obligation d’autorisation pour autant que l’on soit en présence de custodial direct staking au nom et pour le compte des clients. Cependant, si les cryptoactifs sont collectés auprès de plusieurs clients sur une adresse de staking, ce service impliquerait une conservation collective entraînant l’exigence d’une autorisation au regard du droit bancaire.

Bien que la communication ne donne pas de réponses à toutes les incertitudes liées au staking au regard du droit suisse, elle permet au moins de mettre en évidence les risques liés à cette activité et les réflexions à mener lors de la structuration d’un projet de custodial staking. La question de la conservation des cryptoactifs et de leur distraction devra s’examiner à l’aune des clarifications apportées par la communication.