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Blanchiment d’argent

Acquittement partiel pour défaut d’élément subjectif

Dans un arrêt du 24 septembre 2025, le Tribunal fédéral rappelle que la réalisation de l’infraction de blanchiment d’argent suppose l’intention de l’auteur, à tout le moins sous la forme du dol éventuel, et que la seule violation, même importante, des règles anti-blanchiment ne permet pas encore d’inférer une telle intention (6B_1180/2023).

Le Ministère public de la Confédération reproche à un employé de banque d’avoir ouvert des comptes bancaires en indiquant des fausses données client et d’avoir, entre 2003 et 2012, effectué des transactions en connaissance de la provenance criminelle des avoirs (qui constituaient visiblement des pots-de-vin).

La Cour d’appel du Tribunal pénal fédéral, en seconde instance, acquitte l’employé pour la plupart des faits et le condamne pour blanchiment aggravé commis entre le 8 juillet et le 25 août 2010.

Le Ministère public de la Confédération recourt au Tribunal fédéral, qui lui donne tort.

Les Juges de Mon Repos rappellent la frontière (qui peut être délicate à établir) entre dol éventuel et négligence. Si l’auteur suppose, avec une certaine probabilité, que les avoirs proviennent d’une infraction grave passible d’une sanction importante, mais s’abstient de toute enquête pour éviter de découvrir la vérité, le dol éventuel est admis. S’il ne se rend simplement pas compte, par imprudence, de la provenance criminelle des valeurs, les éléments constitutifs de l’infraction de blanchiment d’argent ne sont pas réalisés.

En l’espèce, le Tribunal fédéral ne trouve rien à redire au raisonnement de la Cour d’appel du TPF selon lequel les manquements constatés dans les obligations de diligence au début de la relation bancaire et au moment de certaines transactions ne permettent pas encore de déduire une intention trompeuse du prévenu, qui n’était intéressé que par son bonus. Le caractère crasse des violations constatées semble même ici bénéficier au prévenu à l’heure pour la Cour d’appel de constater que les services de contrôle de la banque n’ont pas bougé. En extrapolant un peu, on a l’impression que, si elle était allée jusqu’au bout de son raisonnement, la Cour aurait fait remarquer que le prévenu, s’il avait voulu tromper les instances de contrôle, s’y serait pris de manière plus subtile.

Les juges d’appel admettent également que l’employé souhaitait visiblement ne pas en savoir trop, sans toutefois en déduire un dol éventuel.

Le principe in dubio pro reo ne permet de retenir une intention qu’à partir du printemps 2010, au moment où l’instruction aura permis d’établir que le prévenu a eu connaissance du lien de parenté entre le titulaire formel du compte (un homme de paille) et le protagoniste principal de l’infraction préalable.

A noter encore que le Tribunal fédéral donne raison à la Cour d’appel qui a acquitté le prévenu pour certaines transactions auxquelles il ne participait plus après avoir été promu à un autre poste, et ce, même s’il avait continué de s’occuper de la relation bancaire litigieuse. L’acte d’accusation ne permettait pour le surplus pas un examen sous l’angle de l’omission.

On rappellera en guise de conclusion que l’établissement de l’élément subjectif relève de la constatation des faits et que le Tribunal fédéral ne s’est donc prononcé que sous l’angle de l’arbitraire.