Aller au contenu principal

Projet de loi

Réglementer l’activité des intermédiaires d’assurance

Le 19 mai 2021, le Conseil fédéral a adopté le Message concernant la loi fédérale sur la réglementation de l’activité des intermédiaires d’assurance. Ce projet de loi, qui modifie la LSAMal et la LSA, entend encadrer l’activité des intermédiaires actifs dans l’assurance-maladie sociale et dans l’assurance-maladie complémentaire. À titre de rappel, la surveillance des assureurs actifs dans l’assurance sociale incombe à l’Office fédéral de la santé publique, alors que la surveillance des assureurs actifs dans l’assurance complémentaire relève du dicastère de la FINMA. Cette distinction est importante pour ce qui a trait à l’exercice des instruments du droit de la surveillance.

Situation actuelle

Il existe à ce jour un accord de branche concernant les intermédiaires, élaboré par Santésuisse et Curafutura. Il est entré en vigueur le 1er janvier 2021. Ses objectifs consistent entre autres à (i) limiter le montant des commissions versées aux intermédiaires, (ii) renoncer à la prospection téléphonique à froid, et (iii) améliorer la qualité des conseils. Cet accord est fondé sur les art. 19 al. 3 LSAMal et 31a LSA. Il s’applique à toutes les caisses-maladie (art. 2 LSAMal), ainsi qu’aux assureurs qui proposent l’assurance complémentaire (art. 2 al. 1 let. a et b LSA) pour autant que ceux-ci aient adhéré à l’accord. Ce dernier est également complété par un Règlement sur les sanctions et la procédure y afférente. Le caractère non contraignant de ces règles a été jugé insuffisant, de sorte qu’à certaines conditions le projet de loi entend doter le Conseil fédéral de la compétence de donner force obligatoire à certains points de l’accord par voie d’ordonnance, y compris pour les assureurs qui n’y auraient pas adhéré.

Notion d’« intermédiaire d’assurance »

La notion d’« intermédiaire d’assurance », qui figure aujourd’hui à l’art. 35 al. 1 OSAMal, serait transvasée dans la LSAMal (art. 19a P-LSA), à l’instar de ce qui prévaut aujourd’hui dans la LSA. Le Message précise que cette notion est plus large que celle retenue dans l’accord, puisqu’elle couvre également les personnes liées à l’assureur par un contrat de travail et dont l’activité consiste à acquérir de nouveaux clients.

Compétences du Conseil fédéral

Les nouveaux art. 19b P-LSAMal et 31a P-LSA prévoiraient que le Conseil fédéral peut, à la demande d’assureurs représentant au moins 66 % des assurés, par voie d’ordonnance, donner force obligatoire, dans le domaine de l’assurance maladie sociale/complémentaire, pour tous les assureurs, à la réglementation des points de l’accord concernant :

  • l’interdiction du démarchage téléphonique des personnes qui n’ont jamais été assurées auprès d’elles ou qui ne le sont plus depuis un certain temps (cold calling). L’accord définit la prospection à froid comme tout premier contact établi avec des clients potentiels avec lesquels il n’existe aucune relation de clientèle ou qui ne sont plus clients depuis plus de 36 mois, qui ont choisi un opting-out ou pour lesquels le contact n’est pas dû à une recommandation d’un tiers connu du client potentiel ;
  • la formation initiale et continue (connaissance des produits) des intermédiaires et l’obligation pour un assureur de ne travailler qu’avec des intermédiaires qui sont au bénéfice d’une formation suffisante. Le Message précise que les assureurs sont toutefois libres de choisir la formation en question, pourvu que celle-ci soit de nature à atteindre son objectif ;
  • la limitation de la rémunération de l’activité d’intermédiaire d’assurance qui doit être fixée selon les règles applicables en économie d’entreprise ; et
  • la rédaction et la signature d’un procès-verbal pour les entretiens de conseil, lequel peut être établi électroniquement. Le Message ajoute que la signature du procès-verbal vaut accord de la part de l’assuré quant à la proposition que l’intermédiaire fait parvenir à l’assureur et confirme en particulier que l’entretien n’a pas été obtenu par le biais d’un démarchage téléphonique à froid.

Instruments du droit de la surveillance et sanctions

Pour les assureurs sociaux, le projet prévoit la possibilité pour l’autorité de surveillance, en cas de non-respect des règles dotées de la force obligatoire, d’interdire à cet assureur de rémunérer les intermédiaires avec lesquels il n’est pas lié par un contrat de travail et d’ordonner une limitation des frais de prospection de nouveaux clients. Ces mesures pourraient être prises pour une durée maximale d’un an (art. 38a P- LSAMal).

Pour les assureurs privés, le projet prévoit la possibilité pour la FINMA, en cas de non-respect des règles dotées de la force obligatoire, de refuser d’approuver les tarifs d’un assureur, d’ordonner l’adaptation de tarifs existants et de prendre des mesures de sûreté au sens de l’art. 51 LSA (art. 38 al. 2 P-LSA). Ces mesures comprendraient par exemple le droit d’exiger la révocation des personnes chargées de la haute direction et l’interdiction d’exercer toute activité dans le domaine de l’assurance pour une durée de cinq ans au plus, ainsi que la radiation d’un intermédiaire du registre au sens de l’art. 42 LSA.

À noter qu’en sus de ces instruments, le projet prévoit également des sanctions pénales en cas d’infractions à une réglementation qui a force obligatoire (art. 54 al. 3 let. h et 4 P-LSAMal et art. 86 al. 1bis et 2 P-LSA).

Conclusion

Le projet n’est pas une surprise sous l’angle législatif et les règles qu’il pose tant dans la LSAMal que la LSA s’inscrivent dans une certaine continuité en termes d’action réglementaire dans le secteur des assurances (voir à cet égard le Message concernant la révision partielle de la LSA). De surcroît, l’existence de l’accord de branche, largement adopté par l’industrie, devrait faciliter la mise en œuvre de ces nouvelles règles.