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Assistance administrative en matière fiscale

Information par voie édictale de l’existence d’une procédure d’assistance

Lorsqu’une société étrangère titulaire d’un compte bancaire a élu domicile auprès d’un mandataire en Suisse dans le cadre d’une procédure d’assistance administrative, l’Administration fédérale des contributions (AFC) peut-elle utiliser la voie édictale pour informer son ayant droit économique de l’existence de la procédure ? Le Tribunal fédéral a répondu positivement à cette question dans un arrêt du 8 novembre 2022 destiné à la publication (2C_772/2021 et 2C_773/2021).

Les références des comptes bancaires de la société en question figuraient sur la liste annexée par la France à sa demande d’assistance administrative dite « collective » formée en 2016 et visant plus de 45’000 numéros bancaires. En effet, la dernière adresse connue de l’ayant droit économique de la société se trouvait en France. Au mois de juillet 2016, les personnes concernées par cette procédure ont été informées par l’AFC au moyen d’une publication dans la Feuille fédérale, les invitant à communiquer une adresse en Suisse, afin d’éviter qu’une décision finale ne leur soit notifiée par voie édictale. À la suite de cette publication, un avocat suisse a annoncé avoir été consulté par la société, qui s’opposait à tout échange de renseignements et formait élection de domicile en son étude.

En mai 2020, l’AFC a rendu une décision finale à l’attention des personnes habilitées à recourir qui ne lui avaient pas communiqué le nom d’un représentant en Suisse autorisé à recevoir des notifications. La décision visant la société et son ayant droit économique a été publiée dans la Feuille fédérale, en raison de l’absence de communication par l’ayant droit économique d’une adresse de communication en Suisse. Cette décision publiée dans la Feuille fédérale n’a pas été contestée par l’ayant droit économique de la société.

En octobre 2020, cette décision a été notifiée à la société à son domicile élu en Suisse auprès de son avocat. Un recours contre cette décision a été formé par la société, ainsi que par son ayant droit. Le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours de la société et considéré que celui formé par son ayant droit économique était irrecevable, puisque la décision lui avait été valablement notifiée par voie édictale cinq mois auparavant.

Dans sa décision, le Tribunal fédéral confirme que l’on ne peut reprocher à l’AFC de ne pas avoir contacté directement la personne concernée par la demande française, à savoir l’ayant droit économique de la société, et de s’être limitée à l’informer de la procédure par publication dans la Feuille fédérale. La demande de la France n’étant pas nominative, une telle publication était autorisée (art. 14 al. 5 LAAF). Par ailleurs, la présence en France du domicile de l’ayant droit économique figurait dans la documentation transmise par le détenteur des informations. Le Tribunal fédéral considère ainsi que l’AFC peut s’en tenir aux informations reçues quant au domicile de la personne concernée, puisque la LAAF ne lui impose pas de les vérifier, en particulier en vue de déterminer si cette personne aurait pris domicile en Suisse tel que cela était le cas en l’espèce. En outre, le Tribunal fédéral retient que lorsque seul le titulaire d’un compte bancaire a désigné un représentant en Suisse habilité à recevoir des notifications, l’AFC n’a pas à s’enquérir auprès de lui pour savoir s’il ne représente pas aussi l’ayant droit économique du compte. Sur cette base, le Tribunal fédéral confirme que la notification de la décision par voie édictale était juridiquement correcte et par conséquent que le délai de recours pour l’ayant droit économique des comptes a commencé à courir à la suite de cette publication.

Par cette décision, le Tribunal fédéral valide donc la possibilité pour l’AFC de déterminer le mode de communication d’une décision en matière d’assistance administrative en s’en tenant aux informations transmises par la personne concernée ou par la personne détentrice des informations. Dans ce cadre, aucun devoir d’investigation particulier ne lui incombe et ce quand bien même une information pertinente pour la notification de la décision aurait pu être aisément obtenue que ce soit en raison de la localisation en Suisse du domicile de la personne concernée ou de la participation à la procédure d’une autre partie détenant cette information.

À la suite de cette décision, nous retenons que l’élection de domicile effectuée par une société titulaire d’un compte n’est pas valable pour son ayant droit économique. Par ailleurs, l’AFC n’a pas l’obligation de vérifier si le domicile élu par cette société est également valable pour son ayant droit économique. En conséquence, l’ayant droit économique qui n’a pas notifié d’élection de domicile doit s’attendre à une publication édictale qui fera courir le délai de recours à son égard. En effet, il ne pourra pas recourir contre la décision au moment d’une notification postérieure au domicile élu par la société.