Projet de révision totale de la loi sur les fonds de placement : le Conseil fédéral charge le DFF d'élaborer un projet de loi
Lionel Aeschlimann
Le 3 décembre 2004, le Conseil fédéral a franchi une nouvelle étape sur la route vers l’adoption de la future loi sur les placements collectifs de capitaux, destinée à remplacer la loi du 18 mars 1994 sur les fonds de placement. Il a en effet pris connaissance du rapport sur les résultats de la procédure de consultation, dont il ressort que le projet a été favorablement accueilli, et chargé le Département fédéral des finances d’élaborer un projet de loi, accompagné d’un message, d’ici fin septembre 2005. On peut donc espérer une entrée en vigueur de la loi en 2007-2008.
Le projet de loi, qui sera fondé sur l’avant-projet de la Commission d’experts Forstmoser et Oberson mis en consultation le 1er février 2004, constituera un développement majeur et très attendu dans le monde des instruments de placement collectif. Il introduira un certain nombre d’innovations, voire de révolutions, des plus intéressantes dans notre droit. Notamment en droit des sociétés mais également en droit fiscal avec l’adoption formelle du principe d’imposition transparente pour toutes les formes de placement collectif de capitaux (à l’exception cependant de la société d’investissement à capital fixe (SICAF)).
Alors même que, pour les fonds suisses, l’actuelle loi sur les fonds de placement limite son champ d’application aux fortunes gérées sur la base d’un contrat de placement collectif (fonds dits contractuels), la nouvelle loi s’étendra à d’autres formes de placement collectif de capitaux, ouverts ou fermés, selon le principe « same business, same rule », tels la société d’investissement à capital fixe (SICAF). En outre, elle créera deux nouvelles formes de société : la tant attendue société d’investissement à capital variable (SICAV) et la fort prometteuse société en commandite de placement collectif, appelée à devenir l’équivalent suisse du limited partnership de droit anglo-saxon si couru pour les investissements en private equity.
Conformément aux souhaits du Conseil fédéral, la nouvelle loi protégera les investisseurs de façon différenciée en fonction de leur degré de sophistication. La définition qui sera retenue pour « l’investisseur qualifié », auquel s’appliqueront des dispositions allégées, est attendue avec impatience. Comment les clients fortunés seront-ils définis (high net worth individuals) ? Le DFF sera à cet égard bienvenu de s’inspirer des notions existantes au sein de l’Union Européenne (UE).
Par ailleurs, le Conseil fédéral a chargé le DFF d’examiner si l’obligation d’obtenir une autorisation pour les distributeurs pouvait être purement et simplement abandonnée. Objet de controverse depuis de nombreuses années en raison de la surveillance multiple qu’elle implique (au niveau du promoteur, du produit, du représentant et du distributeur), cet allégement serait certainement bienvenu.
Fait marquant, le Conseil fédéral a décidé de ne pas soumettre, à ce stade, les fondations de placement à la nouvelle loi sur les placements collectifs de capitaux. Il préfère attendre les conclusions d’une autre commission d’experts chargée en août 2004 d’élaborer un rapport sur la surveillance et la forme juridique d’institutions de prévoyance professionnelle. Or, si la protection des (petits) investisseurs constitue le but ultime de toute réglementation financière, la surveillance des fonds de pension constitue sans conteste, en Suisse, un sujet qui mérite la plus grande attention. Une approche coordonnée avec les placements collectifs dans leur ensemble serait hautement souhaitable.
Enfin, si l’on peut se réjouir avec d’autres du fait que le projet de loi sur les placements collectifs contribuera à assurer l’euro-compatibilité de nos produits, on continuera de regretter que cette compatibilité n’offrira que peu d’avantages aux fonds suisses, à défaut d’un accord bilatéral avec l’UE. A moins que le débat ne puisse un jour être déplacé au niveau de l’OMC…
Voir en ligne : communiqué du DFF