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Etendue de la procuration conférée à un tiers

Le Tribunal fédéral vient de publier les considérants d’un arrêt du 23 février 2006 (4C.72/2005) qui précise l’étendue du devoir de diligence de la banque dont le client a signé une procuration en faveur d’un tiers.
Le recourant A. avait ouvert en 1994 un compte courant auprès de la banque X., intimée, au départ dans le but exclusif d’effectuer des placements fiduciaires auprès de banques au bénéfice d’une notation AAA. Le recourant signe une formule de procuration (Vollmachtsformular) en faveur de son fils D. A partir de 1999, la banque X. effectue diverses opérations à terme sur devises à la demande de D. Ces opérations se soldent en 2000 par une perte de 132’400 couronnes norvégiennes, soit 25’354 francs suisses. A. engage une action en justice pour obtenir le remboursement de cette somme par la banque. Il est débouté par le tribunal de commerce de Zurich et fait recours auprès du Tribunal fédéral.
Le Tribunal fédéral rejette le recours de A. Il ressort des constatations de fait de la précédente instance cantonale, lesquelles lient le Tribunal fédéral, que la procuration conférée par le recourant à son fils était illimitée. Le Tribunal fédéral peut seulement examiner si D. a abusé de sa procuration et si la banque le savait ou aurait dû le savoir.
Le Tribunal fédéral rappelle le principe de l’art. 33 al. 3 CO, selon lequel l’étendue des pouvoirs du représentant est déterminée envers les tiers par les termes de la communication qui leur en a été faite. On doit présumer la bonne foi du tiers, que celui-ci ne peut invoquer s’il savait ou aurait dû savoir que le représentant était lié par des instructions du représenté (renvoi à l’ATF 131 III 511, considérant 3). Dans le cas d’espèce, il n’y avait aucun indice qui aurait pu susciter de telles réserves. Les opérations étaient faciles à comprendre pour D., qui avait une formation commerciale. En outre, le montant de la perte est peu considérable par rapport aux avoirs du recourant à l’époque des opérations en question, soit 15 millions de francs. Le Tribunal fédéral, juridiction de recours en réforme, n’a par ailleurs pas à entrer en matière sur des faits nouveaux que fait valoir le recourant (art. 55 al. 1 let. c OJ).
Enfin, c’est à tort que le recourant déduit d’un précédent arrêt du Tribunal fédéral (arrêt 4C.217/1994 du 6 janvier 1995) que la banque aurait dû considérer que l’instruction donnée par A. de ne faire que des placements fiduciaires auprès de banques notées AAA constituait une limitation de la procuration donnée à D. Dans le cas présent, il faut en particulier souligner que la procuration signée par A. donnait expressément à son fils le pouvoir de faire des placements fiduciaires auprès de banques notées AA, ce qui s’éloignait des instructions données par le recourant à la banque et constituait un indice laissant supposer que les pouvoirs de D. étaient illimités. Par conséquent, le Tribunal fédéral estime qu’il faut protéger la confiance que l’intimée a accordée de bonne foi aux pouvoirs de D. tels qu’ils ressortaient de la communication qui lui en avait été faite.