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Utilisation de la dénomination „Sparkasse“ : désaccord entre la Commission européenne et l'Allemagne

Fin juin la Commission a demandé formellement à l’Allemagne de modifier sa législation bancaire, en particulier l’art. 40 du Kreditwesengesetz (voir IP/06/870). Cette disposition réserve la dénomination « Sparkasse » aux établissements publics ou à ceux investis de tâches d’intérêt public. La Commission estime que l’interdiction faite aux banques privées d’utiliser la dénomination „Sparkasse“ enfreint les dispositions communautaires relatives à la liberté d’établissement et à la circulation des capitaux. En effet, une telle réglementation empêche l’acquisition desdits établissements par des établissements d’autres pays membres ou encore des institutions financières allemandes, en créant ainsi un obstacle aux fusions transfrontières et à la création d’un marché unique de services financiers.
A l’origine du litige se trouve l’assainissement du groupe bancaire berlinois qui comprend le Berliner Sparkasse. En 2004 la Commission autorise l’aide du Land de Berlin à la restructuration du groupe à la condition que celui-ci cède sa participation majoritaire dans ce groupe. A cet effet, le Land de Berlin a adopté en juin 2005 une loi (Berliner Sparkassengesetz) relative à la transformation de la banque cantonale du Berlin en société anonyme, lequel permet aux établissements privés d’utiliser la dénomination « Sparkasse » sous certaines conditions. Une telle loi contrevient toutefois au droit fédéral allemand, notamment à l’art. 40 du Kreditwesengesetz, que le gouvernement fédéral protège fermement. En effet, la demande de la Commission remet en cause le système bancaire allemand, organisé en trois piliers, à savoir les banques publiques (caisses d’épargne et banques cantonales) qui détiennent 44 % du marché ; les banques privées (banques nationales et régionales, banquiers privés, filiales de banques étrangères, etc.) qui détiennent environ 43 % et les coopératives qui ont a leur tour 13 % du marché.
La demande de la Commission s’engouffre dans une brèche toujours plus apparente en Allemagne : la modification de Kreditwesengesetz dans le sens demandé par la Commission intéresse à une partie importante du secteur bancaire constituée de banques et institutions financières au capital privé. En effet, celles-ci se sentent lésées de l’intervention des Lands par le biais de garanties et d’autres types d’aides étatiques et souhaitent voir disparaître la protection des établissements publics de la concurrence. La sauvegarde des tâches d’intérêt public ne justifie pas une telle protection : d’une part, les banques privées considèrent qu’elles octroient aussi des crédits aux petits et moyennes entreprises (voir les arguments de l’association des banquiers allemands, die bank, « Banken brauchen freie Märkte »). D’autre part, la Commission estime que lesdites tâches peuvent être imposées aux établissements privées lorsque celles-ci souhaitent bénéficier du capital de sympathie jouissant la détermination « Sparkasse » : une interdiction serait en effet disproportionnée.
Le gouvernement fédéral allemand, après concertation avec l’association des caisses d’épargnes allemandes ([DSGV->http://www.dsgv.de/de/
]), a proposé à la Commission européenne une modification de Kreditwesengesetz pour permettre aux banques privées d’utiliser la dénomination « Sparkasse » à certaines conditions : celles-ci doivent utiliser les excédents annuels à des tâches d’utilité publique, ne doivent pas étendre leurs activités en dehors de leur région ainsi que seront dans l’obligation d’assurer une offre suffisante de services financiers au public. La Commission européenne – qui voit d’un mauvais œil l’influence de DSGV – reste sceptique sur les conditions proposées, estimant qu’à ces conditions, aucune banque n’aura intérêt à acquérir et utiliser la dénomination « Sparkasse » (voir Financial Times Deutschland du 24 juillet 2005, « EU lässt Sparkassen zappeln »). La Commission attend toujours une réponse formelle de la part de l’Allemagne et, en cas de mesures insuffisantes, portera l’affaire devant la Cour européenne de Justice.