Placements collectifs de capitaux
Le Conseil fédéral adopte finalement le KIID
Olivier Stahler
Le 29 juin 2011, le Conseil fédéral a arrêté une modification de l’Ordonnance sur les placements collectifs de capitaux (OPCC). L’OPCC révisée est entrée en vigueur le 15 juillet 2011. Cette révision concerne tant la reconnaissance des informations clés pour l’investisseur (Key Investor Information Document (KIID)) dans le cadre de l’enregistrement en Suisse de fonds étrangers conformes à la Directive OPCVM (UCITS) que l’introduction du KIID pour les fonds suisses.
Le KIID découle de la Directive UCITS IV. La Directive européenne prévoit qu’à compter du 1er juillet 2011, avec une période transitoire d’une année, le prospectus simplifié doit être remplacé par le KIID. Le KIID consiste en un document standardisé de deux pages qui doit renseigner l’investisseur sur les caractéristiques essentielles d’un fonds. L’introduction du KIID en Europe vise une meilleure protection de l’investisseur notamment par le recours à un nouvel indicateur de risque (synthetic risk and reward indicator). Cet indicateur exprime le profil de risque / rendement d’un fonds sous forme d’une note allant de 1 à 7. Le KIID doit être établi pour chaque compartiment et chaque classe de parts d’un fonds. Il doit être rédigé dans la langue de chaque juridiction dans laquelle le fonds est distribué.
L’introduction du KIID en Europe a soulevé une question essentielle pour les fonds conformes à la Directive UCITS enregistrés auprès de la FINMA. Il s’agissait en effet de déterminer si ces fonds distribués au public en Suisse étaient autorisés à remettre aux investisseurs suisses un KIID en lieu et place du prospectus simplifié. Cette question a finalement trouvé une réponse positive dans la révision de l’OPCC, qui autorise désormais le KIID pour les UCITS enregistrés auprès de la FINMA. Le législateur suisse a pour l’essentiel suivi la prise de position de la Swiss Funds Association SFA de février 2011. La SFA militait notamment pour une approche pragmatique visant à introduire le KIID sans réviser la Loi sur les placements collectifs de capitaux (LPCC).
La révision de l’OPCC prévoit également le KIID pour les fonds suisses. La transposition du KIID en droit suisse ne concerne toutefois pas les fonds immobiliers et les autres fonds en placements alternatifs. Le nouvel article 107a OPCC introduit ainsi le KIID pour les fonds suisses en valeurs mobilières et les autres fonds suisses en placements traditionnels. Une nouvelle annexe 3 à l’OPCC qui reprend le contenu du règlement n° 583/2010 de la Commission européenne du 1er juillet 2010 régit les informations clés pour l’investisseur. Si la terminologie « prospectus simplifié » subsiste dans l’OPCC, on soulignera que d’un point de vue matériel, c’est bien les dispositions du KIID européen qui sont reprises dans la législation suisse. Le projet de révision de la LPCC publié le 6 juillet 2011 par le Département fédéral des finances prévoit d’ailleurs d’introduire formellement à l’article 76 LPCC la terminologie du KIID, soit l’ »information clé pour l’investisseur ».
Les dispositions transitoires des articles 144a et 144b OPCC relatives à l’adoption du KIID en Suisse doivent être qualifiées de généreuses. Les fonds suisses en valeurs mobilières et les autres fonds suisses en placements traditionnels existants ainsi que les UCITS enregistrés auprès de la FINMA disposent d’un délai de 3 ans à partir de l’entrée en vigueur de l’OPCC révisée, soit jusqu’à mi-juillet 2014, pour publier un KIID conforme à la nouvelle annexe 3 à l’OPCC.
L’introduction du KIID en droit suisse pose de nombreuses questions pratiques. Certains éléments de réponse ont été apportés par la FINMA le 15 juillet 2011 dans le cadre de la révision de plusieurs guides pratiques, l’introduction d’une check-list « informations clés pour l’investisseur » concernant les fonds étrangers et l’établissement d’une déclaration du représentant suisse de fonds UCITS. La FINMA précise dans ces documents que le KIID n’est soumis à aucune exigence de signature. La soumission à l’autorité du KIID par voie électronique n’est toutefois en l’état pas prévue. A l’instar de tout document relatif à des fonds étrangers, la FINMA exige que le KIID comporte les coordonnées du représentant et du service de paiement en Suisse ainsi que l’indication du lieu où la documentation relative au fonds peut être obtenue.
La réception du KIID en droit suisse a été bien accueillie par l’industrie des fonds. Ce développement législatif entrainera néanmoins un important défi pour les promoteurs qui devront établir un KIID pour chaque classe de parts, lequel KIID devra être mis à jour lors de tout changement important, mais au moins une fois par année (article 107a al. 4 OPCC). Compte tenu de la multitude des intermédiaires actifs dans la distribution de fonds, un autre défi pour l’industrie sera de s’assurer que la dernière version du KIID soit effectivement remise à l’investisseur (article 107a al. 5 OPCC). Dans ce contexte, il sera essentiel pour les promoteurs de clarifier les rôles et responsabilités de chaque intermédiaire quant à la distribution du KIID à l’investisseur final.