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Délégation de la gestion d’avoirs de prévoyance

La Commission Triponez délivrera des habilitations provisoires

En date du 14 mai 2013, la Commission de haute surveillance de la prévoyance professionnelle (la « CHS PP« , appelée également Commission Triponez, du nom de son président) a annoncé que les gérants non surveillés d’avoirs de prévoyance pourront bénéficier d’une « habilitation » (Zulassung) à des conditions facilitées afin d’être en mesure de continuer à exercer leurs activités après le 1er janvier 2014, date d’entrée en vigueur de la nouvelle mouture de l’article 48f de l’Ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (l' »OPP2« ).
Cette annonce apporte une certaine sécurité juridique dans l’un des volets les plus controversés de la réforme structurelle de la prévoyance professionnelle. Pour mieux cerner les enjeux de ce récent développement, un bref survol du processus réglementaire – particulièrement tortueux en l’espèce – s’impose.
La réforme structurelle de la prévoyance professionnelle a conduit à un durcissement des conditions auxquelles une institution de prévoyance peut déléguer la gestion de ses avoirs à un tiers. Le projet de révision de l’OPP2 mis en consultation le 12 novembre 2010 prévoyait que la gestion de tels avoirs ne pourrait être déléguée qu’à une entité surveillée par la FINMA (ou à une entité non suisse soumise à une surveillance comparable). En sus, le contrat de gestion devait être soumis au droit suisse et prévoir un for en Suisse (ces deux dernières exigences ont été abandonnées par la suite).
Dans le cadre de la procédure de consultation, la FINMA rappela qu’en l’état actuel du droit, seuls les gérants qui exercent une activité effective (et non pas pro forma) de gestion de placements collectifs peuvent demander à être assujettis à une surveillance prudentielle. Par ailleurs, le Parlement renonça à introduire un régime d’autorisation spéciale pour les gérants d’avoirs de prévoyance lors de la récente révision de la LPCC (sur cette révision, cf. actualité dédié). De fait, le projet de révision de l’OPP2 risquait donc d’exclure les gérants non surveillés (et non susceptibles d’être surveillés) du marché de la gestion d’avoirs de prévoyance.
La version révisée de l’OPP2, adoptée en juin 2011, a partiellement exaucé les vœux de ceux qui, dans le cadre de la procédure de consultation, avaient plaidé en faveur d’un level playing field entre l’industrie bancaire et les gérants non-bancaires. En sus des entités suisses et étrangères surveillées, l’article 48f (4) OPP2 (devenu aujourd’hui l’article 48f (5) OPP2) prévoit que la gestion d’avoirs de prévoyance peut être confiée à un intermédiaire financier habilité par la CHS PP. Cette habilitation est notamment soumise à une exigence de garantie d’une activité irréprochable, déjà connue dans d’autres secteurs de la réglementation financière (cf. rapport explicatif de juin 2011, p. 30).
Au vu de ce qui précède, les gérants qui souhaitent gérer des avoirs de prévoyance après le 1er janvier 2014 doivent impérativement obtenir une habilitation de la CHS PP avant cette date-butoir. Selon l’Association suisse des gérants de fortune, environ 90-110 gérants indépendants (qui représentent des actifs sous gestion de l’ordre de CHF 40-50 milliards) sont concernés par cette nouvelle exigence réglementaire.
La mise en place du processus d’habilitation a toutefois pris un certain retard, laissant craindre que les habilitations requises ne soient pas délivrées à temps. Pour mettre un terme à cette insécurité juridique, la CHS PP a annoncé le 8 mai 2013 qu’elle délivrera des habilitations sur une base « provisoire ». Les gérants concernés (y compris ceux qui ont déjà déposé une requête formelle auprès de la CHS PP) sont invités à remettre à la CHS PP le formulaire ad hoc d’ici au 31 août 2013. La CHS PP délivrera alors une confirmation selon laquelle les gérants concernés sont provisoirement habilités à gérer des avoirs de prévoyance. En parallèle, la CHS PP élabore la procédure applicable à l’habilitation « définitive ».
Selon le rapport explicatif de mai 2013, cette habilitation (limitée à 3 ans à teneur de l’article 48f (5) OPP2) doit être vue comme une solution transitoire. La future loi sur les services financiers devrait soumettre tous les gérants indépendants à surveillance (sur ce projet, cf. article dédié) et rendre superflue l’exigence d’une habilitation spéciale pour la gestion d’avoirs d’institutions de prévoyance.