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Le TF se prononce sur la validité de la clause "sauf bonne fin"

Le Tribunal fédéral vient de publier les considérants d’un arrêt du 4 mai 2006 (4C.427/2005) qui se prononce sur la validité de la clause d’encaissement des chèques « sauf bonne fin » dans les conditions générales des banques.
La société X. S.A. avait ouvert en 2002 un compte à vue en dollars américains auprès de la Banque Y., ce qui valait acceptation de conditions générales dont un article prévoyait que la banque pouvait débiter le compte du client des effets de change, chèques et autres papiers, crédités ou escomptés, s’ils n’avaient pas été payés (clause de bonne fin). Par la suite, il s’est avéré que tous les chèques remis à la Banque Y. étaient soit volés, soit sans provision, ou avaient fait l’objet d’une fraude. La banque a déposé plainte pénale contre X. S.A., ce qui avait entraîné le séquestre du compte de X. SA, levé suite au non-lieu prononcé par le juge d’instruction. La banque obtient ensuite de la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois la condamnation de X. à lui payer les sommes correspondant aux chèques remis à l’encaissement. X. interjette un recours en réforme.
Le Tribunal fédéral rejette le recours de X. en examinant successivement les trois griefs que celle-ci prétend tirer des art. 1 CO, 100 al. 2 CO et 42 al. 2 CO.
Le Tribunal fédéral rappelle que celui qui signe un texte comportant une référence expresse à des conditions générales est lié au même titre que celui qui appose sa signature sur le texte même des conditions générales. La validité de ce principe est toutefois limitée par la règle dite de l’insolite (Ungewöhnlichkeitsregel). Pour déterminer si une clause est insolite, il faut se placer du point de vue de celui qui y consent, au moment de la conclusion du contrat. Plus une clause porte atteinte aux intérêts juridiques du contractant, plus il se justifie de la considérer comme insolite. Dans le cas d’espèce, la clause de bonne fin est usuelle dans la pratique bancaire, et X. SA était active dans le milieu des affaires commerciales internationales. La clause des conditions générales ne saurait ainsi être qualifiée d’insolite ou inhabituelle.
Quant à l’art. 100 al. 2 CO – qui permet au juge de tenir pour nulle une clause qui libérerait d’avance le débiteur de toute responsabilité en cas de faute légère dans le cadre de l’exercice d’une industrie concédée par l’autorité-, il s’applique par analogie aux clauses dites de transfert, qui modifient la répartition des risques indépendamment de tout manquement à une obligation contractuelle. En font partie les clauses, figurant dans les conditions générales des banques, qui ont pour effet de faire supporter au client le risque assumé en principe par la banque. Comme la banque ne devait pas assumer le risque lié au non-recouvrement des chèques, la clause de bonne fin ne peut être qualifiée de clause de transfert.
Enfin, l’estimation du dommage d’après l’art. 42 al. 2 CO repose également sur le pouvoir d’apprécier les faits et ne peut donc être revue en instance de réforme. Seules constituent des questions de droit le point de savoir quel degré de vraisemblance la survenance du dommage doit atteindre pour justifier l’application de l’art. 42 al. 2 CO et si les faits allégués, en la forme prescrite et en temps utile, permettent de statuer sur une prétention en dommages-intérêts déduite en justice. Dans le cas d’espèce, la cour cantonale a rejeté les prétentions en dommages-intérêts formées par X. SA, au motif que cette dernière n’avait pas prouvé avoir subi un dommage. Par ce raisonnement, la cour cantonale a procédé à une appréciation des preuves qui lie le Tribunal fédéral en instance de réforme. Ce grief est donc irrecevable.