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Marchés financiers & réponses du CF

Tour d’horizon des défis pour la place financière suisse

Le Conseil fédéral a récemment publié un rapport décrivant sa future Politique en matière de marchés financiers pour une place financière suisse compétitive. Cette publication s’inscrit  dans un contexte marqué par de multiples et importantes réformes du cadre réglementaire et fiscal. Autour des mots d’ordre que constituent la solidité et le dynamisme, le but déclaré est d’assurer la compétitivité de la place financière suisse. Il comporte aussi – d’un point de vue juridique – un foisonnement de thématiques. Petit tour d’horizon.

Le premier axe vise le Maintien et l’amélioration de l’accès aux marchés, préoccupation centrale pour la Suisse. La solution esquissée consiste en la conclusion d’accords bilatéraux avec les Etats partenaires afin de maintenir, et d’améliorer, l’accès aux marchés étrangers pour les prestataires financiers helvétiques. Avec l’Union européenne, le CF vise « la reconnaissance de l’équivalence de la réglementation et de la surveillance suisses des marchés financiers » en matière de fonds, de services destinés aux investisseurs professionnels, de plates-formes de négociations et de négoce de dérivés. Pour garantir la sécurité du droit et la prévisibilité des activités, les procédures d’équivalence au sein de l’UE doivent aboutir promptement, afin de ne pas desservir l’intérêt du secteur financier et les activités législatives. Aussi, à l’avenir, la solution d’un  accord global sur les services financiers avec l’UE pourra être envisagée. Enfin, concernant la situation avec le Royaume-Uni suite au Brexit, la solution in casu serait une reconnaissance mutuelle de la surveillance et des réglementations, remédiant à l’insécurité juridique actuelle et garantissant, ici aussi, l’accès au marché.

Le deuxième axe s’intitule Rendre l’innovation possible. Le CF estime que les FinTech « doivent bénéficier d’un cadre réglementaire leur permettant d’exploiter au mieux les chances offertes par la numérisation » et qualifie de « crucial » le fait que la réglementation n’entrave leur accès au marché. A cet égard, des modifications législatives sont envisagées pour permettre aux entreprises FinTech, ainsi qu’aux autres « prestataires innovants qui n’opèrent pas selon le modèle bancaire traditionnel » d’accéder au marché. Il est envisagé «  de créer de nouvelles formes d’autorisation ainsi qu’un espace d’innovation non soumis au régime des autorisations ». Cette position prend en considération les sollicitations parlementaires visant le réexamen des normes relatives aux nouvelles technologies financières (p. ex. postulat 15.4086). Depuis le 2 novembre, le DFF est chargé de déterminer les modifications législatives et préparer, d’ici janvier 2017, un projet destiné à la consultation, prévoyant notamment une prolongation du délai de détention pour les comptes d’exécution, l’extension des activités non soumises à autorisation, ainsi qu’une autorisation FinTech et évaluera d’ultérieures mesures afin de faciliter l’accès au marché de ces entreprises.

Pour Optimiser les contenus de la réglementation ainsi que ses processus, cet axe concrétise une volonté d’améliorer l’iter d’adoption de normes grâce aux échanges entre les différents acteurs tout au long de l’élaboration de ladite réglementation. Dans le cadre d’une évaluation a posteriori menée par des organismes indépendants des autorités et de la branche, « le DFF fait évaluer certaines règles régissant les marchés financiers dès que les données d’expérience tirées de leur application sont suffisantes à cet effet ». Ainsi, la LPCC pourrait en faire l’objet. Enfin, pour optimiser la réglementation du secteur, soit la coopération internationale – notamment au sein du FMI, du CSF ou de l’OCDE – soit la coordination nationale entre le SFI, la FINMA et la BNS seront intensifiées.

Afin de Limiter les risques systémiques, le dispositif de l’art. 52 LB prévoit un réexamen bisannuel, « compte tenu en particulier de l’efficacité du régime too big to fail en vigueur, de l’évolution de la réglementation au niveau international ainsi que de la compétitivité internationale de la place financière ». Selon le rapport, il est opportun d’améliorer la protection des déposants mais également de réduire le risque lié au marché immobilier et à l’important volume d’hypothèques, respectivement de l’endettement des ménages. Ce risque est qualifié de systémique (voir aussi Rapport du groupe de travail AFC, OFL, AFF, SECO, SFI, BNS), mais le CF entend pour l’heure s’en tenir au statu quo (imposition de la valeur locative maintenue, intervention via le volant anticyclique).

Last but not least, le domaine fiscal est naturellement riche en défis visant à Garantir la conformité internationale en matière de fiscalité et de blanchiment d’argent. D’abord, dans le cadre de l’EAR, en application de la norme OCDE, en vigueur dès le 1er janvier 2017, la Suisse veillera au respect des principes consacrés par ladite norme à savoir la réciprocité, la confidentialité, la sécurité des données et l’identification de l’ayant droit économique. Avec les Etats-Unis, l’on passera à un accord FATCA de modèle 1, soit un échange automatique de renseignements via les fiscs nationaux et non plus directement aux autorités américaines. Sur le volet des BEPS, le CF appliquera les standards minimaux incluant l’échange pays par pays. Enfin, suite à l’entrée en vigueur des normes révisées du GAFI et au quatrième examen de la Suisse, d’autres mesures normatives seraient envisageables selon les résultats de cette évaluation.

En consacrant, outre le maintien de la compétitivité helvétique, la sécurité du droit comme leitmotiv, ce rapport se révèle prudent. Il prend certes en considération les exigences des FinTech, l’attention majeure qui devra être prêtée au marché immobilier ou encore ouvre la porte à un accord global sur les services financiers, mais l’on regrettera son manque d’approfondissement de certains points, en particulier concernant les FinTech, ou l’annonce de solutions nouvelles pour le risque lié au marché immobilier. In fine, relevons les interactions toujours plus nombreuses à tous niveaux, et une multiplication des réglementations, d’où un équilibre délicat à trouver entre le but déclaré – pérenniser l’attrait de la place helvétique – et les prescriptions importantes pour les différents acteurs financiers.